Meurtre du pont de Neuilly : innocenté, Marc Machin réclame 2 M€

Par Le Parisien, Publiée le 16 Juin 2014 à 07h12.

Près de 2 M€. C’est à cette somme que Marc Machin estime la réparation de l’erreur judiciaire dont il a été victime. Me Louis Balling, l’avocat de celui dont le procès a été révisé onze ans après son incarcération pour un crime qu’il n’a pas commis, va défendre les arguments justifiant un tel montant devant le président de la cour d’appel de Paris aujourd’hui.

Erreur judiciaire : l’indemnisation de Marc Machin connue le 30 juin

L’argent constituant le seul moyen de « réparer » une injustice, la loi distingue préjudice moral et matériel, perte de chance, impact pour les proches…

Marc Machin avait 19 ans quand il a été placé en garde à vue pour le meurtre d’une femme tuée sur le pont de Neuilly (Hauts-de-Seine), le 1er décembre 2001. Après quarante heures de ce huis clos, sous la pression d’un commandant de police manipulateur, il est passé aux aveux. Ainsi, sa détention provisoire a débuté le 15 décembre 2001 pour atteindre 855 jours avant le premier procès. Elle s’est poursuivie plus d’un an jusqu’au verdict d’appel. Condamné à dix-huit ans de réclusion, en 2005, Marc Machin ne serait probablement pas sorti de prison avant la fin de sa peine si le véritable meurtrier, David Sagno, ne s’était rendu pour revendiquer le meurtre, en mars 2008. Résultat, le jeune homme aura passé 2 126 jours en cellule alors qu’il était innocent. A raison de 500 € par jour, la réparation de l’incarcération représente plus de 1 M€.

Le « choc carcéral », c’est-à-dire le traumatisme psychologique engendré par cette « accusation de meurtre qui l’a entraîné dans un engrenage infernal », relève Me Balling, compte dans l’évaluation financière de la réparation. De même que sont prises en considération les conditions de détention dans des maisons d’arrêt « vétustes, insalubres et surpeuplées ».

L’avocat de Marc Machin chiffre le préjudice moral à 800 000 €. Une somme censée compenser les dégâts sur la personnalité de Marc Machin, son « sentiment de n’avoir jamais été cru par personne » et particulièrement le juge d’instruction, resté sourd à ses rétractations, aveugle face à l’absence de preuves et indifférent au second meurtre commis selon le même scénario alors que Marc Machin était enfermé. S’ajoute l’interminable attente avant la révision du procès et l’innocence enfin reconnue en… décembre 2012. Total : 3 457 jours entre la garde à vue et l’erreur judiciaire admise.

L’addition, de 1 997 728 € précisément, comprend aussi les salaires que Marc Machin aurait touchés s’il avait eu une vie normale et travaillé, entre 19 et 26 ans, ainsi que les honoraires de son avocat. Me Balling réclame, en plus, 600 000 € pour le préjudice subi par le père de Marc Machin, son frère et sa sœur. Il serait surprenant que la justice accède à de telles demandes : le représentant de l’Etat estime à 150 000 € la réparation du préjudice de Marc Machin.

Avant lui — il est la huitième personne victime d’une erreur judiciaire admise par la justice en soixante-dix ans — Loïc Sécher, le septième, a obtenu près de 800 000 € pour 3 856 jours de procédure, dont 2 652 passés en prison, et 110 000 € pour sa famille. Il avait été condamné à tort pour viol. Pour Patrick Dils, blanchi en 2002 après quatorze ans de prison et deux condamnations pour le meurtre de deux enfants à Montigny-lès-Metz (Moselle) en 1986, la justice a fixé l’indemnisation à 1 M€. Marc Machin ne sera pas fixé aujourd’hui. La décision sera mise en délibéré.

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